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Pauline Delabroy-Allard, « Ça raconte Sarah ». Par Corinne Amar

édition septembre 2018

Articles critiques

Ça raconte Sarah est le premier roman de Pauline Delabroy-Allard, envoyé par la Poste à plusieurs éditeurs, choisi et publié par les éditions de Minuit, et récompensé par le jury du prix littéraire présidé par Olivier Poivre d’Arvor et créé par Fondation La Poste. C’est l’histoire d’une passion entre deux jeunes femmes d’une trentaine d’années que l’amour prend par surprise un soir de réveillon chez des amis ; une amitié qui se transforme en passion, une passion douce, une passion folle, une passion toute, une passion partagée, somptueuse, montée aux nues, vécues aux nues et puis, orageuse, foudroyante, exclusive, ravageant tout sur son passage, ne laissant plus que bris, débris. La narratrice enseigne dans un lycée, vie inscrite dans un quotidien sans éclat, a un enfant qu’elle appelle l’enfant, comme si l’histoire racontée, excluait tout autre prénom que Sarah. Son amoureuse, son héroïne elle, est drôle, fantasque, impétueuse, musicienne qui voyage de par le monde avec son quatuor, et se jette à corps perdu dans son amour. Ça raconte Sarah, raconte Paris la nuit, le jour, les jeux de piste dans Venise – quand l’amoureuse doit repartir mais laisse dans la ville pour son amour les traces de son désir -, Trieste, le premier trio de Brahms, ça raconte Sarah, « raconte le moment précis où l’allumette craque, le moment précis où le bout de bois devient feu, où l’étincelle illumine la nuit, où du néant jaillit la brûlure. Ce moment précis et minuscule, un basculement d’une seconde à peine. » Le roman, magnifique, dans sa forme, sa phrase, son histoire, est écrit en deux temps ; le premier dressant le portrait de Sarah, le second racontant le voyage en Italie de la narratrice, loin, seule, la douleur de la séparation, la douleur de la passion. Ça raconte Sarah, tel un leitmotiv dans le roman, telle une obsession, bouleverse par sa grâce, sa foi, sa puissance narrative.