FloriLettres

Entretien avec Lucie Taïeb. Propos recueillis par Nathalie Jungerman

édition décembre 2019

Entretiens

Enseignante-chercheuse, poète et traductrice, Lucie Taïeb a écrit plusieurs ouvrages, (Tout aura brûlé, éditions Les inaperçus, 2013, La retenue, éditions Lanskine, 2015, Safe, éditions de l’Ogre, 2016), et donne régulièrement des lectures publiques. Elle a publié, cette année 2019, un essai (Freshkills, recycler la terre, éditions Varia), un recueil de poèmes (Peuplié, éditions Lanskine) et un roman (Les Échappées, éditions de l’Ogre) pour lequel elle a reçu le Prix Wepler Fondation La Poste.


Dans votre livre, Les échappées, pour lequel vous avez reçu le prix Wepler-Fondation La Poste, vous faites le récit, notamment, d’une société dystopique où les individus sont entièrement voués à leur travail. Ils ne peuvent flancher sous peine de disparaître et d’être remplacés aussitôt... Quelles sont vos sources d’inspiration littéraire ou même cinématographique en lien avec la dystopie ?  

Lucie Taïeb Cet aspect du récit peut effectivement faire écho à des représentations littéraires de sociétés totalitaires. Néanmoins, je suis partie du réel et j’ai un peu forcé le trait. J’ai commencé à écrire ce livre en 2015, au moment de la réforme des retraites. Le slogan entendu quelques années plus tôt : « travailler plus pour gagner plus », une tendance qui pouvait laisser penser que le travail, toujours plus intense, n’était pas fait dans de bonnes conditions, a aussi amorcé cette partie de la narration. Évidemment, c’est très actuel.

Mais quand on pense à George Orwell (1984) ou à Terry Gilliam (Brazil), ou encore à Enki Bilal, le réel est aussi le point de départ de leurs œuvres...

L.T. Oui, mais je n’y ai pas pensé au moment de l’écriture. Ces références sont ancrées en moi, cependant elles ne sont pas à l’origine du point de départ qui provenait davantage d’un rapport au réel social et politique. Pour autant, il y a de plus en plus d’écrits dystopiques et ce n’est sans doute pas un hasard. C’est aussi une réaction de sensibilité à l’air du temps. L’idée d’une oppression peut aussi faire penser au film populaire Matrix, si l’on veut pousser les choses plus loin. Ceci dit, le roman de Cormac McCarthy, La Route, que j’ai lu en même temps que j’écrivais, a été très important. Il ne s’agit pas d’un roman dystopique, mais post-apocalyptique, où un père et son fils errent dans un monde complètement désolé, dévasté. Quelques scènes des Échappées en sont dérivées, notamment celle de la cérémonie où des gens vêtus de blanc, qui tiennent des bougies, se réunissent à l’emplacement où un corps a disparu. Dans La Route de McCarthy, ce sont des hordes de sauvages, mais c’est comme un halo transfiguré, transposé. Ce qui m’a frappée dans ce roman terrible, désespéré, c’est le regard de cet enfant qui continue de croire en la bonté possible du monde. J’y ai lu une grande force et me suis demandé comment un écrivain pouvait emmener son lecteur dans des scènes aussi éprouvantes et cruelles tout en gardant un personnage intact. Je n’avais pas encore terminé l’écriture de mon livre et ne savais pas quelle fin lui donner quand j’ai achevé la lecture de La Route. Alors que j’aurais pu faire mourir tous mes personnages, victimes du délitement que je leur imposais, le roman de McCarthy m’a procuré le souffle que je n’aurais peut-être pas eu spontanément. La fin de mon livre est ouverte et offre un espoir : l’enfant à l’arrière de la voiture va se métamorphoser plutôt que s’autodétruire.

Était-ce volontaire ou un hasard de commencer l’écriture de votre texte en même temps que la lecture de La Route ?

L.T. J’avais déjà commencé à écrire le livre quand je me suis mise à lire La Route et ce n’était pas complètement un hasard d’entreprendre cette lecture. Mes deux personnages de femmes, la vieille et la jeune aux nattes orange, étaient en place dans mon texte. Pour écrire leurs dialogues, je voulais comprendre comment fonctionnaient ceux du père et du fils dans le roman de McCarthy, qui sont des dialogues blancs, sans signes d’énonciation. Je n’ai peut-être pas assez de recul pour l’affirmer, mais je crois que le côté poétique ou décalé des échanges entre les deux femmes, n’est pas un geste volontaire mais provient davantage des voix des protagonistes de La Route que j’ai eues dans l’oreille. C’était la première fois que j’écrivais des dialogues dans un récit et il me plaisait que la voix puisse s’y mêler, qu’elle soit rythmée dans la narration, qu’on l’entende, sans que ce soit informatif.

Certaines scènes sont terribles et particulièrement celle qui concerne les yeux de la vieille femme... Comment vous est-elle venue ?

L.T. Quand j’écris, j’essaie de me mettre dans une concentration extrême. Je n’avais pas prévu cette scène, elle est venue au cours de l’écriture, presque inconsciemment, alors que j’étais dans cet état de grande concentration qui n’est pas très éloigné du rêve éveillé. La question ensuite est de savoir si je garde ou non les images qui adviennent. Les éditeurs, à qui j’ai demandé leur avis après avoir rendu mon texte terminé, ont lu cette scène – qui me semblait finalement aller trop loin et pouvoir être extraite d’un film gore ! – comme une puissance, celle d’une vieille femme dont on ne connaît ni l’âge ni l’identité. Dans d’autres scènes aussi, par exemple, celle de l’asphalte qui engloutit les passants, il y a des incursions du surnaturel, du fantastique. Mais à la relecture, ce passage sur les yeux m’a plutôt semblé être de l’ordre du don, du lien. Que peut-on faire de plus pour quelqu’un que de lui donner ses yeux ? Ce n’est pas tant le rôle de ces femmes dans l’histoire qui m’intéressait que le soutien qui les lie, à l’instar de cette phrase : « c’est la prunelle de mes yeux », quand on parle de ses propres enfants. Cette scène est comme une métaphore qui s’incarne.

Vous évoquez ce lien mais pourtant, ces personnages n’ont pas de chaleur humaine, ils sont distants bien qu’ils marchent bras-dessus, bras-dessous...

L.T. Parce qu’ils sont comme des images, c’est dans le geste que les liens passent. Ce n’est pas transitif. Il y a quelque chose d’abstrait.

En rapport avec la poésie ?

L.T. J’ai vraiment un goût pour l’abstraction, ce qui explique peut-être que j’écrive de la poésie. Je suis entre deux pôles : l’abstrait et le sensible. Il s’agit aussi d’une esthétique – pour la répétition, le formel, le minimalisme, une certaine économie de moyens – qui effectivement crée une froideur.

Il y a donc des corps qui s’effondrent et sont emmenés on ne sait où, puis des corps que l’asphalte engloutit tel un marécage...
« Lorsque les voix ne sont plus entendues, ce sont les corps même qui entrent en jeu, corps sacrifiés, corps révoltés », avez-vous dit dans votre discours de réception prononcé à la brasserie Wepler le lundi 11 novembre... Votre texte présente une réflexion sur le corps, la voix, la politique et le langage poétique...

L.T. Je voulais essayer de montrer comment l’oppression passe par le corps. Pour ceux qui s’enfoncent dans l’asphalte devenu liquide, ce n’est pas tant la gravité du corps que le fait qu’il n’y ait plus de sol sous les pieds. Tout le texte est traversé de verticalité qui chute : ces corps oppressés subissent le poids de la menace et d’un régime autoritaire. La peur les recroqueville et les durcit... Le personnage de l’homme en gris du comité de surveillance porte une pierre en lui. Elle représente toute sa frustration, son incapacité à exister. À un moment donné, elle tombe pour ainsi dire à l’intérieur de lui-même et le fait s’effondrer. Puis, à la toute fin du texte, des corps immobilisés sont sur la plage tels ceux de naufragés après une bataille. Ma pensée procède par images qui se font écho : la fluidité du sol, celle de la mer. Cette manière de mettre en relation les images ou les mouvements, comme la verticalité, le liquide, la solidité de la pierre, ou la pétrification en opposition avec la liquidité... est du côté de la poésie. En tout cas, il s’agissait de montrer comment ces corps se figent, sont de plus en plus lourds pour devenir ensuite une sorte de matière brute. Et à l’opposé, en montrer d’autres en mouvement par le biais des deux femmes qui s’échappent, suivent une ligne de fuite, évoluent dans des mouvements horizontaux qui leur permettent de s’émanciper.   

« Le roman décrit moins un geste révolutionnaire qu’il ne s’interroge sur ses conditions d’émergence : comment revenir à soi, comment desserrer l’étau ? C’est cette première étape qui m’intéresse ici, celle du passage à l’acte salutaire, du mouvement presque instinctif par lequel on rejette le joug, avant de s’en libérer complètement, et d’en libérer tous les autres », dites-vous également dans votre discours de réception. La disparition et la fuite remplacent le conflit, la révolte ?

L.T. Oui, parce qu’il s’agit de chercher le basculement d’une aliénation acceptée, la faille d’une société qui vit sous une chape plus ou moins confortable. Comment sort-on de la soumission ? Je n’indique pas le chemin, parce que je ne le connais pas et n’ai pas envie de l’imaginer. La disparition et la fuite sont une manière, pour ces personnages, même s’ils sont dans des situations et des mondes différents, d’échapper à un joug ou de sauver leur vie. Car l’enjeu est là : sauver sa vie et celle de celui qui vous accompagne. Mais il y a aussi l’idée que dans l’incertain de cette brume, des groupes se forment, une révolte s’organise et quand la brume se lève, un nouveau monde apparaît. Je n’exclue pas la possibilité de la révolte active, mais simplement, je ne pose pas mon regard sur elle, je ne la décris pas parce que je suis les individus dans leur recherche d’une émancipation ou dans leur mouvement de fuite...

En lisant votre livre, j’ai pensé à certaines images du film The Lobster de Yórgos Lánthimos, bien que le sujet soit très différent puisque le diktat exige de trouver son « âme sœur » sous peine de subir une métamorphose animale. Il y a une résistance qui s’organise, la fuite dans les bois, des personnages étranges...

L.T. C’est amusant, je n’y aurais pas pensé mais je comprends pourquoi. Les personnages ne sont pas vraiment incarnés non plus. Les corps ne s’enfoncent pas dans l’asphalte, mais ils subissent également une transformation. C’est aussi un rapport au sensible.
Dans mon texte, même si l’histoire avance, il y a un moment où le lecteur ne sait pas ce qui se passe. Le temps s’arrête alors que, pour les personnages, il s’agit toujours d’un présent face au monde ou face à l’autre. Saisir ce moment de présence au monde et à l’autre tout en questionnant l’intensité du sensible m’intéresse, parce que c’est une des clés de réponse et une manière d’échapper à l’asservissement. Comme dit Stern, c’est se retrouver soi-même dans le rapport au monde. Réussir à voir le monde, c’est être dans un présent qui dure, ne serait-ce qu’un peu, et pas dans un temps qui vous dévore parce qu’on est tout entier absorbé par une tâche. Le corps au travail, si celui-ci est aliénant, c’est un corps qui n’existe plus pour lui-même. Là, ce sont des corps qui se retrouvent dans un réel, un peu étrange, certes.

Vous faites ici référence à Stern qui ose défier la menace. Pouvez-vous nous parler de ce personnage ? Et pourquoi ce nom, Stern, qui évoque la judéité ?

L.T. Personne ne m’a dit que mon héroïne, qui défie tout le monde, avait un nom juif, donc je n’en ai pas parlé  ! « Stern » est venu spontanément, son prénom aussi, « Marga  », mais je ne l’ai pas gardé. « Stern » signifie l’étoile et apparaît dans le texte en plusieurs langues. Il y a une incertitude temporelle avec ce personnage – puisqu’on ne sait pas exactement quand les bandes-son ont été enregistrées – qui convient bien au décalage de perception d’une étoile. « Stern » c’est aussi l’idée, dans le messianisme juif, d’une rédemption qui va venir. Le philosophe allemand Franz Rozenzweig, dont la pensée est axée sur la temporalité, a publié, en 1921, un ouvrage intitulé L’Étoile de la rédemption, qui est une sorte d’espace de l’utopie et d’un temps qui est comme une réparation du monde. Il y a aussi l’idée que cette réparation peut venir du passé, d’une manière d’écouter le passé. Avant d’être un personnage, Stern a une fonction : être une voix qui provient du passé, capable de mettre dans le présent un levain pour un futur libéré. Aussi, il coïncide plus ou moins avec le personnage de la mère. C’est une des possibilités de lecture. Cette femme au foyer, complètement passive, est devant sa fenêtre à tout voir mais à ne rien dire, à surveiller mais à ne jamais intervenir, et tourne ses confitures inlassablement. Que ce personnage effacé puisse cacher une voix visionnaire et révolutionnaire m’amusait. Et surtout, il pose la question de ce qu’est une héroïne. Est-ce une guerrière qui va organiser, fomenter la révolution, fédérer des groupes, ou est-ce peut-être cette femme au foyer, inoffensive, un peu absente de son présent qui enregistre ses bandes pour le temps à venir ? Ce qui rejoint des interrogations autour de la condition féminine et de la place que peut prendre une mère dans l’histoire. Cela faisait écho pour moi à des témoignages de femmes, mères, qui se sont engagées dans la Fraction armée rouge... Jusqu’où peut-on garder une vie « normale » ? Je cherche toujours le point de rupture : Jusqu’où c’est possible ? Combien de temps ? Est-ce qu’on peut continuer à avoir une vie tout à fait normale en étant une résistante ou dans des mouvements révolutionnaires ? Pour le personnage de Stern, toutes ces tensions-là m’intéressaient. Stern dispense un espoir dans les petits transistors : Enfin quelqu’un parle aux autres ! Mais ça ne suffit plus. Elle est aussi une voix qui vous endort : Les violons sont sirupeux. Le livre, d’une certaine manière, se refuse aussi d’être juste une voix qui vous parle. Il demande au lecteur un peu de travail et c’est pourquoi il y a toutes ces tensions, et ces éléments qui ne sont pas résolus.

Et cette autre figure, Oskar, dont le nom a des variations ? 

L.T. Le prénom vient du Tambour de Günter Grass [adapté au cinéma en 1977 par Volker Schlöndorff], l’enfant qui ne grandit pas. C’est le personnage le plus lisible, je crois. Il se met à dysfonctionner car il est atteint d’un mal étrange, lié au fait qu’on nie ce qu’il a à dire. Il a vécu quelque chose dont les adultes affirment que ça n’a pas existé. C’est d’une grande violence. Dans un monde adulte, la parole de l’enfant n’a pas beaucoup de pouvoir, d’autorité. Ce personnage en métamorphose interroge ce qu’il est possible de supporter avant de mourir et pose la question d’une mort effective, littérale ou bien d’une transformation.
Quant aux variations sur son prénom, elles se situent peut-être du côté de la poésie. Dans son dysfonctionnement, il inverse les chiffres, les lettres. Son nom devient Askaro. Puis, il y a des jeux de langage autour de ce mot, notamment « as de carreau » qui en anglais se dit « ace of diamonds »... Les autres personnages, dans le monde dystopique, ne sont pas nommés parce que je ne voulais pas désigner la vieille femme, ni la jeune comme étant Stern puisqu’elles ne doivent pas se faire attraper. Qui est Stern ? Le texte ne donne pas de réponse à cette question. On peut choisir, chercher les liens. Je pense qu’on a un peu trop l’habitude de récits et de scénarios où tout est limpide et très cadré. Ici, le récit ouvre ces questions d’identité.  

Pourquoi avoir choisi de découper le livre en saisons ?

L.T. Je n’ai pas travaillé avec un plan et ne savais pas au début que les chapitres allaient prendre le nom des saisons. Dans la structure du texte, l’ordre dans lequel on lit est celui dans lequel j’ai écrit. Seuls quelques fragments ont bougé, mais la règle que je m’étais fixée était de toujours avancer dans le temps, que ce soit linéaire. À la fin de « l’été », puisque le texte commence avec l’été, et quand je suis « rentrée dans l’automne », je me suis dit que les saisons allaient rythmer le récit. Ceci permettait de faire de cet hiver brumeux qui n’en finit pas, un hiver non pas de mort mais de repos, de convalescence et de germination secrète, tellement secrète et prolongée qu’on sort de cette saison au mois de mai. Le dernier chapitre s’intitule donc « Mai ». Le printemps, compris dans l’hiver, a eu lieu dans cette brume.

Il y a quelque chose de l’ordre du rêve...

L.T. Oui. Dans mon premier roman, Safe, le rêve était encore plus fortement présent. Il y avait des récits de rêves inventés et d’autres vécus. Ce n’est pas une pensée très originale mais cet onirisme est pour moi un réservoir de puissance. Je pense que dans les rêves, même s’ils portent la marque du temps, il y a encore une forme d’énergie intacte qui peut venir innerver ou nourrir le récit.

Est-ce qu’on peut dire que ce texte, Les Échappées, est un roman ?

L.T. Pour moi, c’est un roman, avec des troubles, des zones de turbulences, deux fils narratifs, deux récits qui se tissent. Je ne crois pas qu’on sorte du roman quand on essaie de l’emmener ailleurs ou lorsqu’on le met en difficulté. La forme « roman » n’est pas une forme figée, standard, dans laquelle on doit rentrer une histoire. Je pense au contraire qu’on a une marge de manœuvre très large, encore faut-il vouloir l’explorer. Je ne suis pas du tout opposée au roman classique, avec une trame narrative très claire. Mais, ne serait-ce que par l’exercice de la polyphonie ou de diverses techniques injectées à certains moments, je crois qu’on peut faire muter la forme. Pour autant, elle reste du roman.

Que représente le Prix Wepler-Fondation La Poste pour vous ?

L.T. Je suis très contente pour « nous », pour les deux éditeurs, mon livre et moi ! Les éditions de l’Ogre font des choix et cherchent à mettre en valeur une littérature en laquelle ils ont raison de croire. J’ai l’impression que le geste du jury du Prix Wepler-Fondation La Poste est de cet ordre parce qu’il sélectionne des textes qui tentent encore d’inventer une langue. Tout en mettant mes pas dans ceux des autres, je ne réinvente pas une écriture à partir de rien, j’essaie de rechercher la justesse, livre après livre. J’ai trouvé des éditeurs qui m’accompagnent, accueillent mes tentatives. Ce prix reconnaît leur travail et donne de la visibilité à mon roman.


Lucie Taïeb
Les Échappées
Éditions de l’Ogre, 2019.
171 pages.
Prix Wepler-Fondation La Poste

Lucie Taïeb
Freshkills, recycler la terre,
Éditions Varia, 2019.
111 pages

Lucie Taïeb
Peuplié
Éditions Lanskine, 2019.
136 pages

Lucie Taïeb
Safe
Éditions de l’Ogre, 2016.
169 pages