FloriLettres

Édito novembre 2018. Par Nathalie Jungerman

Heinrich Böll. Lettres de guerre 1939-1945

Édito

C’est en travaillant à l’édition de Comme un Allemand en France, un recueil de lettres inédites de soldats allemands sous l’Occupation, avec les historiens Aurélie Luneau et Stefan Martens, sous la direction éditoriale de Rachel Grunstein (L’Iconoclaste 2016), que Jeanne Guérout s’est intéressée à la correspondance de guerre de Heinrich Böll, né en 1917 à Cologne (et mort en 1985), dont le roman Portrait de groupe avec dame (Gruppenbild mit Dame) lui vaudra en 1972 le Prix Nobel de littérature. Publiée en Allemagne pour la première fois en 2001, cette correspondance n’avait jamais été traduite en français. Jeanne Guérout, historienne et journaliste franco-allemande, a donc entrepris de traduire et commenter un large choix de lettres écrites pendant les six années de mobilisation du soldat Böll, adressées essentiellement à ses parents et à sa fiancée Annemarie Cech qu’il épousera en 1942. Né dans une famille catholique pacifiste, Böll n’a pas encore 22 ans lorsqu’il est enrôlé dans l’armée allemande. Quelques années plus tôt, il a refusé d’adhérer à la jeunesse hitlérienne. Pour autant, il pense que le Reich est attaqué, que l’engagement de sa patrie est légitime. Envoyé en Pologne, en France, puis au front de l’Est, il fait part de ses observations sur les paysages, les villes qu’il découvre, sur les civils qu’il aime à rencontrer, et ses descriptions sensibles qui annoncent l’écrivain, même si elles font preuve d’empathie, d’enthousiasme ou parfois de désespoir, ne sont pas exemptes d’idées reçues, de préjugés moraux, physiques ou culturels... Ces lettres préfacées par Johann Chapoutot, professeur d’histoire contemporaine à la Sorbonne, passionnent, questionnent, tant par ce qu’elles racontent, révèlent – et notamment les paradoxes d’un jeune occupant, futur grand écrivain allemand de l’après-guerre, influencé malgré lui par la propagande, à la fois lucide et ignorant, ou inconscient – que par ce qu’elles ne disent pas... (la violence faite aux populations civiles par les soldats de la Wehrmacht, les pogroms, les rafles, les déportations, les camps... ).

Nathalie JUNGERMAN


Sites Internet

Éditions L’Iconoclaste

Lire l’article de Corinne Amar sur l’ouvrage Comme un Allemand en France
https://www.fondationlaposte.org/florilettre/articles-critiques/comme-u…

La République des Lettres - Heinrich Böll

Fondation Heinrich Böll