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Édito mai 2025. Par Nathalie Jungerman

Haute Solitude - Jean Zay, Un film de Laurent Véray

Édito

Haute Solitude est un film de Laurent Véray, produit par Thomas Schmitt (société La Chambre aux fresques), qui a reçu le soutien de la Fondation La Poste. Historien du cinéma, professeur à l’Université Sorbonne Nouvelle et membre de l’Institut de recherche en cinéma et audiovisuel (IRCAV), Laurent Véray est l’auteur de nombreux articles et ouvrages sur les représentations de la guerre, les usages des images d’archives et la question du patrimoine cinématographique. Lors de la projection à Orléans de La Cicatrice : une famille dans la Grande Guerre (2014), un des documentaires qu’il a réalisés pour la télévision, il rencontre les deux filles de Jean Zay (1904-1944) : Catherine, récemment disparue, et Hélène, qui lui permettent d’accéder aux archives privées de leur père. Ainsi commence le projet d’un film sur cet « homme de conviction », visionnaire, ministre de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts (Jeunesse, Sports et Recherche aussi), de juin 1936 à septembre 1939. Son ministère, décisif dans l’histoire des politiques éducatives et culturelles, a réformé le système scolaire, démocratisé l’accès aux bourses pour l’enseignement supérieur et la recherche, créé le CNRS… En réponse à la Mostra de Venise, contrôlée par les fascistes, il a imaginé le festival de Cannes dont la première édition aurait dû se tenir en septembre 1939. Arrêté en août 1940 par le régime de Vichy, faussement accusé pour désertion aux armées, il est condamné « à une peine qui vise à rappeler celle d’Alfred Dreyfus ». Détenu quatre mois à la prison militaire de Clermont-Ferrand, transféré au Fort Saint-Nicolas de Marseille puis incarcéré en janvier 1941 à la Maison d’Arrêt de Riom, Jean Zay est assassiné par des miliciens français le 20 juin 1944. Laurent Véray a conçu son film autour de cet enfermement, s’imprégnant des lieux où Jean Zay a vécu les dernières années de sa vie, mettant en scène les traces du passé et les images d’aujourd’hui, les associant aux photographies datant d’avant la détention ou à celles prises clandestinement à l’intérieur de la prison de Riom. Le récit est construit à partir d'une sélection des textes qu'il a écrits tous les jours pendant son incarcération, et particulièrement les lettres adressées à ses proches. Haute Solitude, titre qui n’est pas sans rappeler le recueil de proses poétiques de Léon-Paul Fargue, rend hommage à Jean Zay, panthéonisé le 27 mai 2015, il y a dix ans.
Au sommaire de ce numéro, on trouvera également un article de Gaëlle Obiégly consacré à François Truffaut, Correspondances avec des cinéastes (Gallimard, mai 2025), une édition de Bernard Bastide qui avait publié en 2022 les Correspondances de Truffaut avec des écrivains (Prix Sévigné).